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quinta-feira, maio 24, 2012


ACTUALITE MEDICALE
Dépistage du cancer du sein entre 40 et 49 ans : pour quelles femmes ?
Publié le 24/05/2012Partager sur Twitter Partager sur Facebook Imprimer l'article Envoyer à un confrère Réagir à l'article Enregistrer dans ma bibliothèque Reduire Agrandir

L’intérêt d’un dépistage précoce du cancer du sein par mammographie chez les femmes de moins de 50 ans fait l’objet de débats. Il pourrait se révéler utile quand le risque est élevé, supérieur à deux fois la normale. L’identification et la quantification de facteurs de risque (FR) particuliers aux femmes entre 40 et 49 ans sont donc essentielles afin d'individualiser celles  susceptibles de bénéficier au mieux d'une mise en route précoce d’une surveillance mammographique.
A partir des grandes bases de données médicales (Medline, Cochrane Central Register of Controlled Trials et Cochrane Database of Systematic Reviews ) et aussi de celles issues du Breast Cancer Surveillance Consortium (BCSC) , tous les articles publiés en langue anglaise, ces 19 dernières années, traitant de cette question ont été analysés. Il pouvait  s’agir d’essais contrôlés et randomisés, d’études observationnelles, de revues systématiques ou encore de méta-analyses à l’exclusion des publications concernant des femmes suivies après cancer du sein ou de l’ovaire, ou porteuses d' un cancer canalaire in situ ou non invasif, ou suivies pour pathologie mammaire bénigne ou dans le cadre d' une mutation BRCA1/BRCA2 à titre personnel ou familial et enfin de celles sous surveillance après irradiation mammaire.

Méta-analyse de 95 articles

Afin de déterminer leur influence sur l’incidence du cancer du sein invasif chez les femmes âgées de 40 à 49 ans, toute une série de FR ont été analysés : race et origine ethnique, indice de masse corporelle (IMC), activité physique, tabagisme, alcoolisme, antécédents familiaux de cancer du sein, densité de la glande mammaire, biopsies préalables et antécédents gynécologiques (âge des premières règles, parité, âge de naissance du premier enfant, allaitement, contraception orale, âge, statut et type de la ménopause, enfin traitement hormonal post ménopausique). Tous les articles extraits des bases de données ont été lus attentivement par deux examinateurs indépendants. N’ont été retenus pour la méta-analyse que ceux considérés comme bons ou au minimum, acceptables. Ainsi, sur un total de 884 articles colligés en texte intégral, seuls 95 ont été inclus dans la méta- analyse, selon des critères pré définis.
Selon les données BCSC, la race ou à l'origine ethnique ne sont pas apparues conférer un risque particulier. Contrairement à la notion communément admise pour la période post ménopausique, 18 des publications ont signalé qu'un surpoids, voire une obésité, constituaient, dans cette tranche d'âge, des facteurs de moindre risque avec un rapport de risque (RR)  respectivement à 0,86 et 0,90. Aucune différence significative n’a été notée selon le degré de l'activité physique. Dans trois des études, l'intempérance éthylique entraînait une augmentation du risque. Il n'en était pas de même pour le tabagisme qui, dans 12 des articles retenus, ne constituait pas un FR complémentaire.

Densité mammaire et antécédent familial, les deux facteurs de risque majeurs

Surtout, 52 études épidémiologiques ont souligné que des antécédents de cancer du sein chez un apparenté au premier degré augmentaient, de façon très significative, le risque de tumeur mammaire, d’autant plus que celui-ci avait développé tôt son propre cancer. Ce risque était multiplié par 3 chez les femmes dont un  proche avait été atteint avant 40 ans  et de 2,17 quand le cancer parental était survenu avant 50 ans.
De la même façon, l'augmentation de la densité mammaire appréciée de 1 à 4 sur l’échelle Breast Imaging Reporting and Data System (BI-RADS), apparaît, en soi, être un FR majeur; le RR varie ainsi de 0,46 pour des seins de catégorie 1, totalement adipeux, à 1,62 pour des seins en catégorie 3 avec présence de densités fibro glandulaires disséminées et culmine à 2,02 pour ceux en catégorie 4, extrêmement denses. Plus singulier, les données BCSC révèlent que des antécédents de biopsies mammaires ou de ponctions à l'aiguille pour pathologies bénignes doivent aussi être rangés dans les FR avec un RR non négligeable de 1,51.
La survenue des premières règles après 15 ans a été associée à un risque plus faible comparativement à des règles plus précoces, avant 13 ans (RR à 0,82). La nulliparité, à l’inverse, élève le risque (RR à 1,16) ainsi que l'âge de naissance tardif, après 30 ans, du premier enfant (RR à 1,2 par rapport aux femmes dont la première grossesse est survenue entre 25 et 29 ans). L’allaitement apparaît comme un facteur protecteur, surtout quand il a été prolongé, 12 mois ou plus (RR à 0,87). L'utilisation d'une contraception orale a des effets divergents selon les publications mais la cohorte BCSC la désigne comme un FR propre avec un RR à 1,3. Ce FR est toutefois plus faible quand la prise de contraceptifs intervient en période péri ménopausique.

Un IMC à plus de 25, protecteur…

Au terme de cette vaste méta analyse, les deux FR les plus importants, susceptibles de multiplier par deux ou plus le risque de cancer du sein entre 40 et 49 ans sont la présence de seins très denses et la notion de cancer du sein chez un parent au premier degré. Le risque augmente encore quand il y a deux proches atteints dans la même famille ou quand le cancer du sein a touché une parente avant l'âge de 40 ans. Des antécédents de biopsie mammaire ou de seins denses de façon hétérogène multiplient le risque dans un rapport de 1,5 à 2. La prise de contraceptifs oraux, bien que variable selon les sources utilisées, la naissance du premier enfant après 30 ans et la nulliparité apparaissent également comme des FR significatifs. A l'  inverse, un IMC élevé, égal ou supérieur à 25 kg/m2, une survenue tardive des premières règles, la naissance de 3 enfants ou plus, l’allaitement sont des facteurs protecteurs, minorant le risque.
En pratique donc, sous réserve de biais possibles et dans le cadre de la population étudiée, la prise en compte d'antécédents familiaux de cancer du sein et de glandes mammaires très denses pourrait être des critères pertinents afin de débuter précocement, dés la quarantaine, une surveillance mammographique chez des femmes à haut risque.


Dr Pierre Margent

Nelson H D et coll. : Risk factors for Breast Cancer for Women Aged 40 to 49 Years. A systematic review and meta- analysis. Ann Intern Med; 2012; 156:635-648.